Historique de l'Orgue et des Evêques de Vabres l'Abbaye
Histoire de l'Orgue Micot (1761) de la cathédrale de Vabres l'Abbaye
Troisième instrument remontant à l’ancien régime de l’Aveyron (après celui de la cathédrale Notre-Dame de Rodez et celui, de la collégiale Notre-Dame de Villefranche-de-Rouergue) et le mieux conservé des trois, l’orgue Micot de l’ancienne cathédrale Saint-Sauveur-et-Saint-Pierre de Vabres-l’Abbaye est un des deux seuls exemplaires, très proches de leur état originel, de l’art des sieurs Micot.
Cet orgue fut construit par un grand facteur d'orgue d'origine Lyonnaise, officier chez le roi Louis XV et facteur d'orgue de la reine Marie-Lesczinska à Paris, Jean-Baptiste Micot et deux de ses fils. Génial inventeur d'instruments de musique comme des orgues de tables, après un passage par Saint-Jean de Luz il vient s'installer à Toulouse. En 1761 et 1762 il réalise à Vabres avec deux de ses fils, l'un de ses rares instruments conservés pratiquement en l'état. Ce fut l'un de ses premiers Grands Orgues.
« On appréciera les timbres des jeux, la délicatesse et la limpidité de son harmonie, le moelleux des jeux de fond, la clarté et le scintillement des pleins-jeux, la rondeur des cornets et jeux de tierce, le timbre brillant et un peu agreste des jeux d’anches. Tout est doux, ample et harmonieux. »
Jean-Pierre Decavèle, technicien conseil pour les orgues auprès des Monuments Historiques
Composition de l'Orgue Micot (1761) de la cathédrale de Vabres l'Abbaye
3 claviers et 32 registres
Positif
50 notes de Ut à Ré5 sans Ut#1
Basse Flûte 4’
Dessous Montre 8’
Bourdon 8’
Montre 4’
Doublette 2’
Nasard 2’ 2/3
Tierce 1’ 3/5
Fourniture III rangs
Cymbale II rangs
Cromorne 8’
Grand Orgue
50 notes de Ut à Ré5 sans Ut#1
Bourdon 16’
Montre 8’
Bourdon 3’
Prestant 4’
Doublette 2’
Grosse Tierce 3’ 1/5
Nasard 2’ 2/3
Quarte 2’
Tierce 1’ 3/5
Fourniture IV rangs
Cymbale III rangs
Trompette 8’
Clairon 4’
Cornet V rangs
Voix humaine
Récit
34 notes (2° fa)
Flûte
Cornet II rangs
Trompette 8’
Pédalier à la française
24 notes de Ut1 à Ut3 sans Ut#1
Flûte 8’
Flûte 4’
Trompette 8’
Clairon 4’
Tremblant doux
Tremblant fort
Accouplement Pos. / G.O. par tiroir
Récit de l’histoire des Evêques de Vabres
1. Les origines de Vabres
Remontons jusqu’au III ème siècle avant l’ère chrétienne… Les Celtes qui occupaient déjà l’Europe presque entière, s’avancèrent jusqu’aux Cévennes et ajoutèrent à leur vaste empire toutes les contrées qui s’étendent entre les Pyrennées et le Rhône, imposant leurs lois, leurs mœurs et leur civilisation. C’est de cette époque que date notre origine Celtique. Dolmens et tombeaux celtiques dans la région en témoignent encore. Ce fut ensuite l’occupation de la Gaule par les Romains : Des monuments nombreux nous le rappellent dans la région : les arènes de Nîmes, la maison carrée, la porte d’Auguste, le pont de Gard… S’en suivi un siècle de prospérité…et une époque de christianisation. Saint Martial, premier apôtre en Aquitaine et faisant parti des 72 disciples de Jésus, fut envoyé par Saint Pierre pour évangéliser les Gaules. Saint Martial fut accompagné de Saint Amadour et de son épouse Sainte Véronique, et prêcha l’évangile à Rodez. Cela marque les origines de la christianisation dans la région. Saint Martial, évêque de Limoges, envoya ensuite Julianus, Aurélian et Marius au pays de Rouergue et dans les autres contrées voisines pour annoncer l’Evangile. Marius se dirigea vers Vaber (aujourd’hui Vabres) composé de 18 chaumières. Puis il alla se fixer à Curie (aujourd’hui Saint Affrique) où il convertit en peu de temps un grand nombre d’habitants de ces contrées. Saint Marius devint plus tard le patron du monastère de Vabres. Le passage de Saint Marius a laissé des traces encore vivantes dans la paroisse de Vabres. La rive droite du Dourdou qui s’étend du pont vieux jusqu’au village porte le nom de : pré de Saint Marius. Affricanus, évêque de Comminges puis dépossédé de son siège, vint alors dans le Vabrais. Animé d’un zèle indomptable, ses prédications de tardèrent pas à être couronnées de succès. Il bâtit une église dédiée à Saint Saturnin. C’est ainsi que Curie devint plus tard Saint Affrique.
2. L’ Abbaye de Vabres
L’Abbaye de Vabres doit sa naissance au milieu du IX ème siècle à Raymond Ier, comte de Toulouse, qui souhaitait construire un monastère dans le Rouergue. Il fut rapidement arrêté par l’évêque de Toulouse que ce nouveau monastère serait fondé à Vabres. Ce qui détermina ce choix, fut le site plein de poésie de ce petit village, l’aspect un peu sauvage de ses montagnes couvertes alors d’épaisses forêts et le peu de richesse apparente d’un sol qui ne semblait pas devoir jamais tenter la cupidité des barbares. Les religieux y vivront sous la règle de Saint Benoît et assureront le service religieux dans la région, donneront l’hospitalité aux étrangers, soulageront les pauvres… L’abbaye de Vabres compta plusieurs siècles de grande prospérité et avait alors un très grand renom, tant à cause de l’étendue de ses domaines que du nombre et de la ferveur de ses religieux. De nombreuses riches familles firent dons d’une portion de leurs domaines à ces religieux qui étaient la providence des pauvres. Tant que l’Abbaye de Vabres resta sous la protection directe des rois de France, ce fut pour elle une sauvegarde et un gage de prospérité. Mais lorsqu’arriva vers la fin du Xème siècle la décadence des Carolingiens, ces traités devinrent caducs et beaucoup de monastères se trouvèrent à la merci de puissants seigneurs affranchis de l’autorité royale. Celui de Vabres fut dans ce cas : pour échapper à une destruction imminente, il eut recours au saint Siège dont il demanda à dépendre directement. Mais malgré cette précaution, le monastère de Vabres fut envahi par des hommes ambitieux ou cupides et ne tarda pas à décliner et à perdre son prestige et elle fut même désertée. Pour conjurer ce malheureux destin, le pape Nicolas II, eût pour idée d’affilier ce monastère à la célèbre Abbaye de Cluny : mais ce projet n’aboutit pas… Une charte datée de 1062 fit alors cession du monastère à l’Abbaye Saint Victor de Marseille. Ce fut alors une vraie résurrection pour l’Abbaye de Vabres : pendant plus de 200 ans, quelques moines dont la vertu était éprouvée prirent la direction du couvent de Vabres, en ayant pour but de le restaurer de façon prospère et de lui rendre sa ferveur première. Elle put reprendre dans la région son influence perdue quoiqu’avec moins d’importance.
3. Les évêques
Parmi les évêques de Vabres, citons quelques noms : - Pierre D’Olargues qui fut nommé en 1317 1er évêque par le Pape Jean 22, alors en siège à Avignon. - Raymond d’Aulargues qui fonda vers 1329 une communauté de prêtres à Saint Affrique. - Bertrand de Pebrac en 1353, homme intelligent et résolu qui soutint le roi Jean le Bon lors de la guerre de 100 ans contre les anglais. En récompense des services rendus, le comte d’Armagnac accorda le privilège de bâtir des maisons avec une tour et de sonner les cloches pour annoncer les réunions publiques. - Etienne de Vasignac qui eut la satisfaction de voir son diocèse redevenir français en 1368 à la fin de la guerre de 100 ans.
4. Les évêques (suite)
Citons encore d’autres évêques : - Louis de Narbonne qui fit bâtir le chœur de l’église-cathédrale vers 1510 - Jacques de Corneillan et François de Lavalette qui durent rétablir le calme dans les diocèses de Rodez et de Vabres après les révoltes dues aux guerres de religion autour de 1560 et l’apparition de la réforme. En 1594, l’objectif était de reconstruire l’église-cathédrale incendiée par les protestants et dont seuls quelques pans de murs restaient debout. - Isaac Habert qui fit construire le magnifique maître-autel vers 1646. Jusqu’en 1793, date de la suppression de l’évêché, 24 titulaires se sont succédés sur son siège épiscopal. Après la tourmente révolutionnaire, le diocèse de Vabres fait retour à celui de Rodez dont il avait été primitivement détaché.
5. La cathédrale
Lorsque les religieux bénédictins appelés à Vabres en 862 pour y fonder un monastère, ils y bâtirent une église pour la célébration de l’office et pour l’utilité des habitants de la contrée qui ne tardèrent pas à se regrouper autour de l’abbaye. On suppose que cette église fut seulement provisoire et sans architecture bien caractérisée. Tout indique une construction d’une église bien postérieure à la fondation de l’Abbaye. Lorsque le Pape Jean XXII érigea l’évêché de Vabres en 1317, les premiers évêques durent se préoccuper de construire une église qui portât plus dignement le titre de cathédrale dont le pape venait de la décorer. Rien de nous dit l’époque précise à laquelle fût commencée cette construction. Mais son style et son architecture sont sûrement de la première moitié du XVème siècle. En 1567, elle fut presque entièrement détruite lors d’un incendie due aux guerres de religion. La façade du Midi est la seule partie de l’édifice qui échappa à l’incendie. La cathédrale fut reconstruite rapidement et entièrement restaurée en 1713. L’extérieur de la cathédrale, quoique peu ornementé, offre l’aspect d’une construction régulière et bien proportionnée. Elle date d’ailleurs d’une époque où l’architecture ogivale avait atteint une perfection qui n’a jamais été dépassée. Malheureusement, elle eut beaucoup à souffrir, pendant les guerres de religion, et quelques restaurations mal comprises ont contribué à lui enlever une unité de style. Vers 1850, on eut l’idée de transformer la tour fortifiée qui servait à protéger la cité et l’église, en clocher. Par contre, on manqua de s’assurer de la solidité et de la profondeur des fondations. Sur les murs existant, on éleva un beffroi massif surmonté d’une toiture en pointe. Les murs ainsi surchargés ne tardèrent pas à se crevasser et à donner des signes d’effondrement. Ce ne sera qu’en 1898 que sur les ruines de la vieille tour, on vit s’élever le nouveau clocher. Nul doute que ce nouveau clocher ajoute au charme de la vallée son élégante silhouette.
6. L’orgue
Dans une partie secrète de la laye du positif de l’orgue une signature : « Fait par Jean-Bte Micot Père et Fils Maîtres Facteurs d’orgues de Paris 1761 ». Micot avait un certain renom, comme l’indique le titre de « facteur du Roi » Louis XV, dont il avait été honoré. L’instrument affirme d’ailleurs son mérite. Il a trente-trois jeux, plus de 2000 tuyaux, et il n’est pas seulement remarquable par sa puissance et sa sonorité, mais aussi par l’élégance des formes qui caractérisa cette époque de la Renaissance du XVIIIe. En 1793, sous la révolution, les boiseries restèrent intactes, et les tuyaux seuls furent enlevés, comme c’était alors la consigne, pour forger des piques contre l’Ancien Régime. Cependant, les patriotes reconnurent vite que les armes d’étain seraient d’un faible secours, et les tuyaux restèrent entassés dans un coin de tribune où ils furent retrouvés quand l’église fut rendue au culte. Les orgues sont dans un état d’abandon complet. En 1822, il s’en est fallu de peu, que l’orgue de Vabres ne soit emporté à St-Affrique par sieur Lassale, organiste à Millau qui a démonté l’orgue sur ordre de sieurs Bourgougnon, maire de St-Affrique et Sarrus procureur de St-Affrique. Le conseil de fabrique de la paroisse de Vabres intenta un procès, et l’orgue resta à Vabres.
7. L’orgue (suite)
En 1835, sur proposition de M. le Curé, la fabrique autorisa la vente des chapelles. La somme ainsi réalisée, jointe à une souscription volontaire s’élevant au chiffre de 2500 permit une réparation complète de l’orgue. Ce travail fut confié à M. Clavel, facteur à Albi, au prix de 4000 francs. En 1861, M. Junk, facteur à Toulouse, fait aux orgues une réparation importante des claviers et de la soufflerie. En 1892, depuis plusieurs années les orgues sont dans un état d’abandon déplorable et il était vraiment dommage qu’un instrument de ce mérite resta perpétuellement muet. M. l’abbé, M… curé de Vabres, prit l’initiative de restaurer l’orgue et, grâce au dévouement du conseil de fabrique et à la générosité de la paroisse, il fut assez heureux de la mener à bonne fin. M. Puget, facteur d’orgues à Toulouse fit un important travail pour 1280 francs. L’inauguration de l’instrument restauré eut lieu le second dimanche d’octobre 1892. Monseigneur l’Evêque, en résidence à Vabres, assista au trône à la grand-messe. Il daigna adresser quelques mots de félicitation à la paroisse et surtout à ceux qui avaient eu l’heureuse pensé de conserver à la cathédrale de Vabres ce magnifique instrument.
Cathédrale de Vabres l'Abbaye
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Occitanie, terre de cathédrales
Vabres-l’Abbaye
Aveyron
Ancienne cathédrale Sainte-Marie
Monument historique inscrit le 13 avril 1992
Propriété de la commune
Une abbaye bénédictine est fondée, en 862, par le comte de Toulouse Raymond 1er et son épouse, qui offrent une villa à des moines bénédictins périgourdins fuyant les invasions normandes. Le 13 août 1317, le pape Jean XXII divise le diocèse de Rodez et crée celui de Vabres. P. d’Olargues, alors supérieur de la grande abbaye de Vabres, est consacré premier évêque.
Des travaux sont entrepris dans les années 1330 pour transformer l’abbatiale en cathédrale. Ralentis par la guerre de Cent Ans, ils se poursuivent jusqu’au début du 16e s. L’appareil régulier en pierre du mur sud, les remplages des baies et le larmier courant tout le long signalent la campagne des 14e-15e s. Le choeur est achevé sous l’épiscopat de L. de Narbonne (1499-1518) qui fait paver l’église et la dote de vases et d’ornements.
La cathédrale est incendiée par les protestants en octobre 1568 ; le palais épiscopal et les bâtiments conventuels sont saccagés. Qualifiée de masure, la cathédrale n’est restaurée qu’à partir de 1594. Financés par la vente de terrain, les travaux sont confiés à M. Mazet, maçon de Vimenet. Ralentis par manque de moyens, ils ne semblent pas achevés le 3 octobre 1672 alors que les boiseries du choeur sont commandées à G. Cadaluenc, sculpteur à Rodez.
Au cours du long épiscopat de Mgr Le Filleul de la Chapelle (1711-1764), les travaux sont terminés : construction des chapelles nord, de deux croisées de la voûte de la nef et de la façade. Une élégante tribune en pierre est édifiée pour porter les orgues conçues entre 1760 et 1762 par le facteur J.-B. Micot (1712-1784) secondé de ses deux fils. L’aménagement intérieur se poursuit jusqu’à la Révolution, avec l’installation d’un maîtreautel en marbre polychrome et bois.
Le diocèse est supprimé en 1790 et la cathédrale est pillée. Le clocher, dont le mauvais état inquiétait déjà en 1761, est reconstruit en 1898-1899 par l’architecte G. Grinda ; une rose est alors percée dans le mur est. La façade occidentale, flanquée au sud par le clocher du 19e s, présente un dessin très simple, desservi par un enduit ciment des années 1970 qui n’a épargné que le portail classique en grès rose, au fronton sculpté des armes de Mgr Le Filleul de la Chapelle et du chapitre.
L’église se compose d’une large nef unique, de 36,5 m de long sur 13 m de large, couverte de voûtes d’ogives, avec d’épais contreforts délimitant dix chapelles inégales. Le choeur à chevet plat est éclairé par une rose et deux baies en arc brisé.
La cathédrale de Vabres, la seule d’Occitanie à ne pas être classée au titre des Monuments historiques, est un monument modeste qui illustre la difficile histoire d’un petit siège épiscopal. En dépit des reconstructions du 17e s., elle conserve les caractéristiques du style gothique languedocien.
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